Trois paysans portent de grandes bottes de foin sur la tête

À Haïti, un nouveau programme pour défendre l’agriculture paysanne familiale

Résistances

Entraide et Fraternité a lancé en 2022 avec ses partenaires haïtiens un nouveau programme ambitieux de cinq ans dénommé APTES pour L’agroécologie, pilier d’une transition écologique et sociale. Son objectif ? Assurer la souveraineté alimentaire et améliorer les conditions de vie de 2950 familles paysannes. Ces familles sont membres de plus de 341 organisations paysannes locales, soutenues par nos quatre partenaires haïtiens, et vivent dans des zones très reculées et délaissées du pays, surnommées tristement par l’État « le pays en dehors ».

Pour atteindre son objectif, le programme vise 3 résultats complémentaires :

  1. L’élaboration et la mise en oeuvre, par l’État haïtien, de politiques publiques favorables à une agriculture écologique qui assure la souveraineté alimentaire de tous. Ce nouveau programme renforce considérablement le plaidoyer politique auprès des autorités locales et nationales. La concrétisation des revendications paysannes, élaborées au cours d’un long processus ayant impliqué les différents mouvements sociaux dans les dix départements géographiques du pays, est au coeur du programme.
  2. La mise en place et la pérennisation d’entreprises solidaires et locales. Le renforcement de l’économie paysanne constitue également une priorité du programme. Celui-ci doit permettre aux paysan·nes de diversifier et d’augmenter leurs revenus. L’accent est porté sur l’empowerment féminin, les femmes étant encore fort discriminées à travers le pays.
  3. L’augmentation de la production agroécologique, tout en garantissant la protection des écosystèmes et la biodiversité. Ce résultat sera visé à travers le renforcement des techniques agroécologiques par les paysan·nes. Les techniques d’irrigation, essentielles pour optimiser une eau de plus en plus rare, seront également au coeur de ce résultat.

Des partenaires qui mettent leurs forces en commun

Ce programme est mis en œuvre par quatre partenaires locaux. Chaque organisation apporte son expertise et ses compétences au sein du programme.

La PAPDA (Plateforme haïtienne de plaidoyer pour un développement alternatif) coordonne le plaidoyer politique. Cette organisation a développé une expertise reconnue dans l’accompagnement et la défense des revendications des paysan·nes auprès des autorités.

SOFA (Solidarité des femmes haïtiennes) est l’une des plus anciennes organisations féministes en Haïti. Elle est en charge d’assurer l’égalité de genre et l’émancipation économique des femmes dans le programme.

SAKS (Société d’animation et de communication sociale) utilise les radios communautaires comme outil d’éducation et de mobilisation populaires. Elle assure la sensibilisation des paysan.nes et facilite la vulgarisation des résultats du programme.

Tèt Kole Ti Peyizen Ayisyen (Solidarité des petits paysans haïtiens, en créole) est un mouvement paysan national. Son travail d’accompagnement sur les techniques agroécologiques ainsi que d’accès à la terre pour les petits paysans fait de lui une référence au niveau national.

Quelle plus-value du programme dans un contexte chaotique ?

La population haïtienne vit véritablement la peur au ventre. Les gangs font régner la terreur en massacrant des civils et en violant des milliers de femmes. Le nombre d’enlèvements a explosé. Un ventre noué par la peur, mais également tenaillé par la faim. L’économie du pays a sombré dans l’inflation et la moitié de la population est en situation d’urgence alimentaire.

Face à un tel contexte, quelle plus-value le programme peut-il apporter ? Ricot Jean- Pierre, directeur de programme à la PAPDA et coordinateur du programme d’Entraide et Fraternité en Haïti, nous répond : « Le programme permet de construire des îlots d’espoir dans un océan de désespoir. Le plaidoyer que nous menons est essentiel car il permet de maintenir vives les revendications et les luttes pour des politiques publiques favorables au développement de l’agroécologie afin de répondre aux défis de la souveraineté alimentaire en Haïti. Ce plaidoyer permet de déconstruire les politiques publiques qui accaparent de grands espaces agricoles pour les multinationales, au détriment des droits des paysans·nes. Or, malgré l’absence quasi-totale de l’État haïtien dans l’accompagnement des paysans·nes, ceux-ci arrivent, au gré de leur force, à produire plus de 40 % de ce qu’on consomme encore aujourd’hui dans le pays. Un effort immense qui risque d’être sapé si on ne fait rien. Le programme est en outre essentiel pour les jeunes et les femmes. Il leur permet de développer des alternatives capables de contribuer à leur autonomie. »

Des résultats prometteurs

paysan

2000 paysan·nes membres de 157 coopératives agricoles déjà accompagnés

plante

Augmentation de plus de 6% du rendement des terres cultivées

chaine brise

10 nouvelles entreprises solidaires créées

main en main

5 paysans militant contre les accaparements de terres libérés de prison grâce aux mobilisations de plusieurs centaines de paysan·nes dans la commune de Prévoyance

carte

Mise en place par les autorités d’un plan parcellaire de la commune de Prévoyance pour y développer l’agroécologie

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