

L’impact des membres de la PAPDA est important et touche de nombreuses communautés de la chaîne des Cahos.
La PAPDA (Plateforme haïtienne de plaidoyer pour un développement alternatif), partenaire d’Entraide et Fraternité depuis 1998, mène un travail de longue haleine avec des organisations paysannes de base dans tout le pays. AFLIDEPA à Limonade au Nord du pays, la SOFA (Solidarité des femmes haïtiennes) et le MITPA (Mouvement pour l’unité des petits paysans haïtiens) à Pérodin, dans l’Artibonite en sont de bons exemples. Leur impact est important et touche de nombreuses communautés aux quatre coins, même isolés, de la chaîne des Cahos, dans l’Artibonite et dans le département du Nord.
Pérodin : un paysage indescriptible, des villages aux allures célestes mais des conditions de vie extrêmes. A sept heures de marche sur des mauvais chemins de Petite-Rivière, la ville la plus proche, quelques maisons éparses semblent s’être posées au milieu de nulle part… Pas d’électricité… On va chercher l’eau à la borne fontaine la plus proche ou on va la puiser à la rivière. L’isolement de Pérodin est géographique (il n’y a pas de route qui mène aussi loin dans les mornes [[montagnes]]) et politique (l’État est complètement absent : les écoles sont à charge des églises, il n’y a qu’un seul dispensaire de santé – géré par une ONG étrangère – pour la zone).
Lors d’une rencontre avec les membres des associations SOFA et MITPA, Dieula, représentante de la SOFA nous dit : « Ce qui nous fait tenir, c’est la solidarité avec les organisations. Venir aux réunions nous renforce, nous donne envie de continuer. Nous voyons que nous sommes ensemble. Ce lieu d’échanges nous permet de discuter, de réfléchir à des solutions. Comment cultiver sur cette terre rocailleuse, comment produire des engrais naturels, apprendre des techniques pour cultiver plus de légumes variés, s’occuper du bétail, utiliser le lait de vache et lutter alors contre la malnutrition ? Quelles techniques utiliser pour conserver nos fruits et nos légumes ? »
La SOFA coordonne plus de 800 paysannes qui, en sortant de leur potager, sortent ainsi de leur isolement et rendent visible leur action. Ces femmes courageuses politisent leur action en lui donnant plus d’échos au niveau local et national. Elles estiment avoir gagné en respect auprès de leurs maris et commencent à se sentir capables de défendre leurs droits auprès du cazek (représentant de la localité) et auprès de l’État haïtien.
La lutte contre la pauvreté des familles paysannes repose sur la mise en route de petites activités dont elles pourront tirer un petit revenu. Pour les femmes de Pérodin, il s’agit de transformer leurs fruits en confitures ou en liqueurs. Elles ont été initiées à la préparation des fruits et à la tenue d’une petite comptabilité simple mais indispensable. Les hommes, eux, ont la charge d’un moulin mécanique installé sur le marché. En 10 minutes, le maïs sera moulu contre une petite participation.
Dans ces montagnes, lors de la saison cyclonique, les vents violents emportent le bétail et les toits des maisons, les récoltes sont ravagées et tout est à refaire ! Les familles paysannes demandent le recours de l’État, qui n’arrive jamais. Excepté durant les périodes préélectorales. « Notre revendication principale, c’est la route ! poursuit Dieula. Nous voulons que l’État construise une route jusqu’à la ville la plus proche ». C’est la raison pour laquelle le programme de la PAPDA et d’Entraide et Fraternité lie étroitement le renforcement des organisations locales, l’appui à l’agriculture paysanne et à l’élevage, et le travail de plaidoyer. L’objectif final est de renforcer les organisations locales pour qu’elles puissent relayer les besoins des communautés et fassent pression sur les autorités locales et nationales pour qu’elles mettent en place les services sociaux de base et les politiques d’appui sans lesquels il ne peut y avoir de résultats à long terme.
Soucieux de leur avenir et de celui de leurs enfants, les paysans sont conscients de la responsabilité qui leur revient. Simon, agriculteur membre de la MITPA conclut : « Le premier devoir de celui qui reçoit la formation, c’est de la transmettre chez lui ou à l’église. Mon rêve, c’est que mon fils devienne un jour agronome, comme Franck et Juliette de la PAPDA, et que nous réussissions à faire construire une route jusqu’ici ».
La relève semble donc bien assurée. Kenbé fem Ayiti (Tiens bon, Haïti).