Un duo de dos assis entrain d'écrire

Interview d’Anissa Mestoui, chargée de projets chez Atout Projet 

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Peux-tu te présenter ? 

Je suis chargée de projets chez Atout Projet. Je dirige les troupes et les animateurs pour les projets de terrain, en veillant à ce que tout soit aligné avec nos valeurs et les exigences de la COCOF. Je suis un peu la personne de référence pour les projets mis en place. Je fais aussi un peu de communication sur mes heures perdues. 

Je suis éducatrice spécialisée de formation. J’ai quitté l’enseignement pour le monde associatif parce que j’avais besoin de vivre (rires), de rencontrer des gens. Le seul truc qui me manque, c’est le contact avec la jeunesse. 

Peux-tu présenter Atout Projet ? 

Atout Projet est une asbl gérée par les 19 échevins de la jeunesse de Bruxelles. Elle a été créée à la suite des émeutes à Anderlecht dans les années 1980, pour favoriser les projets transversaux entre jeunes. 

Notre mission, c’est de faire se rencontrer des jeunes qui, sans nous, ne se croiseraient jamais. 

On travaille actuellement dans les quatre coins de Bruxelles. On engage des animateurs qui interviennent dans des maisons de quartier, maisons de jeunes, espaces jeunesse… Ces terrains ne nous appartiennent pas, ce sont des « terrains partenaires ». Nos animateurs y animent des projets transversaux, que l’on finance notamment via la cohésion sociale. 

Comment est née la rencontre entre Entraide et Fraternité et Atout Projet ? 

Tout a commencé fin 2024. Vincent, membre de l’équipe d’Entraide et Fraternité, connaissait notre directeur, Perceval, et a pris contact avec nous pour voir si nos structures seraient intéressées d’accueillir des partenaires péruviens. Lors d’une deuxième réunion, j’ai d’abord proposé de passer par une école, puis une autre idée a émergé : organiser une journée de sensibilisation entre nos animateurs et le partenaire péruvien Juan Carlos. 

L’idée nous a tout de suite semblé pertinente. Ce sont des professionnels qui exercent le même métier, mais dans des contextes très différents, avec des moyens tout aussi différents. 

Comment cela s’est-il concrétisé avec les animateurs ? 

En janvier, nous avons organisé une première rencontre avec notre équipe. Nous leur avons présenté Entraide et Fraternité, ses valeurs, ses actions. On a aussi proposé une activité que vous utilisez déjà dans votre structure : le jeu « Un pas en avant ». Franchement, il est super. Il a très bien fonctionné avec le groupe, c’était une excellente entrée en matière. 

Ensuite, nous avons évoqué l’arrivée prochaine de Juan Carlos à Bruxelles. On a donc fixé la date du 27 mars. L’objectif de cette journée était clair : créer du lien, partager les pratiques, réfléchir ensemble aux contextes de travail et aux obstacles qu’on rencontre chacun de notre côté. Certains ont même lancé l’idée de projets de voyage au Pérou avec les jeunes, dans le cadre d’Atout Projet. 

C’était la première fois que vous receviez un partenaire international de cette façon ? 

Oui, c’était une première pour nous dans ce format-là. 

Qu’est-ce que ce type de rencontre peut apporter, selon toi ? 

Je peux répondre en tant qu’éducatrice spécialisée : j’y ai vu une vraie opportunité. On a pu échanger avec quelqu’un qui fait le même métier que nous, mais ailleurs. Et ça permet de prendre conscience de la chance qu’on a encore, en Belgique, de bénéficier d’un système social, même s’il est clairement menacé aujourd’hui. 

Juan Carlos nous a décrit un terrain où il n’y a pratiquement rien. Ici, nos bénéficiaires peuvent accéder à des loisirs extrascolaires. Même si on n’intervient pas directement dans le domaine scolaire, on profite d’un cadre qui offre plus de ressources. Il a aussi parlé du manque de diversité dans les formations supérieures au Pérou. Chez nous, les jeunes peuvent choisir entre l’université, la promotion sociale, les formations qualifiantes… Ce bagage en amont nous aide à travailler plus efficacement avec eux ensuite. 

Une réaction marquante pendant la rencontre ? 

Wahiba, une des animatrices du réseau Atout Projet intervient : « Quand j’écoutais la présentation de Juan Carlos, j’entendais manque de subsides, manque d’infrastructures, le mot manque, revient sans cesse… J’avais l’impression d’entendre notre propre vocabulaire. Il est clair qu’on a les mêmes manques mais que cela recouvre des situations différentes.  

En quoi les réalités diffèrent-elles ? 

Anissa reprend : « Ici, il y a toujours un plan B, C, voire Z pour trouver des subsides. Ça ne veut pas dire que tout est simple. On a déjà vu des enfants qui ont faim, ou des familles qui ne peuvent pas payer une activité à 1,50 €. Mais malgré ces situations difficiles, il y a souvent des alternatives. On ne se retrouve pas dans des contextes où les enfants doivent travailler. On peut toujours faire ce travail de terrain, même dans des milieux très précarisés. » 

Lire l’article sur la journée à Atout projet