Deux femmes étant appuyer sur un balcon et regardant l'horizon

Interview de Gudrun

Partager

La lumière douce de cette fin d’après-midi du mois de mars inonde les grandes fenêtres des bâtisses fraîchement rénovées de la résidence Tangissart. Trois adolescents disputent une partie de ping-pong. Sur l’allée centrale, un enfant pédale sur son tricycle, suivi de près par sa maman. 

Gudrun vit ici avec son compagnon, Pascal. Leur appartement, spacieux et très lumineux, est construit à base de matériaux écologiques.  
 
Lidia, notre partenaire du Pérou, nous rejoindra quelques minutes plus tard. 

Depuis quand vis-tu ici ?  

J’habite en habitat groupé depuis 40 ans ! Pascal et moi avons longtemps vécu à Braine-l’Alleud. Nous avons aménagé à Tangissart il y a trois ans, avec un nouveau groupe communautaire.  

Nous avons aménagé ici avec des jeunes familles pour commencer un nouveau projet intergénérationnel. Ici, nous sommes 19 adultes et 14 enfants. Nous sommes quatre foyers de l’ancien habitat de Braine-l’Alleud. Pascal et moi sommes les « anciens » (rires). 

Tu es une connaissance d’Entraide et Fraternité depuis longtemps, peux-tu nous en dire plus ?  

Je connais Entraide et Fraternité et ses actions grâce aux groupes de jeunesses, comme  Jeûner pour changer
Quand je vivais à Braine-l’Alleud, j’organisais des événements Entraide et Fraternité dans les paroisses. 

Dans notre ancien habitat groupé, nous étions en lien avec Entraide et Fraternité à travers un engagement collectif. En plus de la solidarité que nous vivions entre voisins, nous avons mis en place un pot commun pour soutenir des actions de solidarité internationale. 
C’était un choix collectif, pas individuel. Nous ne voulions pas verser directement l’argent à un projet spécifique, pour éviter de créer une relation de dépendance, et la philosophie d’Entraide et Fraternité nous a parlé. Cela faisait vraiment sens pour nous. 

Comment en êtes-vous venus à accueillir nos partenaires au sein de vos foyers ?  

 
Avec le temps, nous avons ressenti une certaine frustration : celui de ne pas pouvoir tisser de lien direct avec les personnes concernées par notre engagement. Nous avons partagé ce ressenti avec Entraide et Fraternité, et ensemble, nous avons réfléchi à une manière de nous sentir plus impliqués. 
C’est ainsi qu’est née l’idée d’accueillir dans notre habitat groupé des partenaires d’Entraide et Fraternité à l’occasion de la campagne de Carême. 
Cela fait maintenant de nombreuses années et nous avons eu la chance de rencontrer des personnes venues du monde entier. Nous recommençons avec le même enthousiasme chaque année. Nous croyons profondément en cette  formule. 

Nous voyageons beaucoup avec Pascal, mon mari. Nous avons plusieurs fois rencontré des partenaires d’Entraide et Fraternité dans différents pays. On est allés au Vietnam, au Laos, à Madagascar, en Inde… 

Quand vous avez déménagé à Tangissart, vous avez choisi d’emmener ce projet avec vous. Comment s’est passée cette transition ? 

On s’est dit qu’on aimerait continuer à accueillir les partenaires, même dans ce nouveau lieu. Alors on a simplement emporté le projet avec nous ! Depuis le déménagement, l’accueil est un peu moins central, mais il est très bien reçu par les autres habitants de Tangissart.  
Ce n’est plus un projet collectif porté par tout l’habitat groupé, mais plutôt une initiative de quelques personnes, soutenue avec bienveillance par les autres. C’est la deuxième année que nous accueillons ici, et cela fonctionne très bien comme ça. 

Lidia nous a rejointes, je l’interpelle : Est-ce ta première expérience en habitat groupé ? « C’est la première fois que je vois ce type d’habitat groupé. Cela existe bien au Pérou, mais il est basé sur la cellule familiale et les liens de sang. Un habitat groupé avec des amis ou des inconnus, je n’avais jamais expérimenté. » 

Concrètement, comment s’organise l’accueil des partenaires dans votre habitat groupé ? 

C’est généralement une ou deux familles qui prennent en charge l’hébergement. Cette année, par exemple, ce sont François et Élisabeth qui reçoivent Lidia. Le choix se fait en fonction de la langue parlée, ou simplement des disponibilités de chacun. 
L’accueil se fait chez l’une ou l’autre famille, tout en profitant de la vie collective de l’habitat groupé. 
 
Le fonctionnement est assez souple : celles et ceux qui ont envie de proposer une activité ou un repas le font et invitent les autres. Des petits groupes se forment spontanément, et certaines associations locales choisissent aussi de participer. 
On essaie toujours de prévoir au moins un moment convivial autour du partenaire pendant le séjour, pour que tout le monde puisse le rencontrer.  

Justement, vous organisez ce soir un moment avec Lidia. Qu’avez-vous prévu ? 

Oui, ce soir, nous organisons une soirée autour de Lidia, dans une de nos habitations. 

Au programme, la projection du film de la campagne de Carême d’Entraide et Fraternité, suivie d’une prise de parole de Lidia. 
L’objectif est de montrer que les projets agroécologiques sont bien plus qu’un simple apprentissage technique. Ils incarnent aussi le partage, la solidarité, la résilience. 
Nous invitons des personnes de notre réseau local, notamment Courto Réseau, le groupe d’échanges de savoirs de Tangissart, et La Roche, avec qui nous menons régulièrement des activités. 

C’est souvent l’occasion de mettre en lien des personnes issues de mouvements associatifs engagés, comme l’ONG Humundi ou l’asbl Nos Oignons. Ce sont surtout des échanges informels.  

Qu’est-ce que cela apporte, d’accueillir une partenaire d’Entraide et Fraternité ? 

Ces rencontres donnent du sens au partenariat avec Entraide et Fraternité, elles nous connectent à ce qui se vit concrètement sur le terrain. Passer une semaine ensemble, c’est ce qui permet aux relations de se construire en profondeur.  

C’est aussi une manière de proposer aux partenaires une autre vision de la société occidentale que celle véhiculée par les médias ou les films : un modèle moins individualiste ou capitaliste, et davantage fondé sur le partage. 

D’un point de vue plus personnel, c’est aussi une façon pour nous de rendre l’accueil chaleureux que nous avons reçu dans les pays que nous avons visités. 

Conclusion  


Notre entrevue se termine autour d’une part de tarte au citron faite maison. Pascal propose une partie de Trésor en vue, un jeu de société qu’il a fabriqué avec Lidia dans son atelier : un plateau en bois peint à la main, où les pions avancent entre obstacles et surprises jusqu’à un trésor de petits diamants colorés. Lidia repartira au Pérou avec ce jeu sous le bras ; une création commune et joyeuse, témoin d’un bout de chemin partagé.