Le 19 mars dernier, Josué Suarez, partenaire d’Entraide et Fraternité au Pérou, a rencontré la maison de quartier La Rochelle à Roux, en périphérie de Charleroi. Psychologue communautaire, Josué travaille depuis cinq ans au sein de l’association Kallpa, où il met son expertise au service de projets sociaux, d’outils numériques et de jeux participatifs visant à promouvoir le bien-être des groupes vulnérables.
Kallpa se bat pour offrir un avenir meilleur aux enfants vivant dans les bidonvilles de Lima, en développant des programmes de soins complets afin de favoriser leur protection, leur santé, leur nutrition et une éducation de qualité. Plus récemment, l’association a aussi lancé des projets autour de la protection de l’environnement. Cette journée de rencontre entre Josué et La Rochelle s’est tenue dans le cadre de notre campagne de Carême 2025.
Cinq partenaires d’Entraide et Fraternité au Pérou ont fait le chemin jusqu’en Belgique, pour rencontrer les citoyens et la société civile de Wallonie et Bruxelles. Un même engagement à renforcer les capacités des plus vulnérables a réuni Josué et les membres de La Rochelle, atour de récits de vie et d’expériences.

Une immersion dans l’esprit de La Rochelle
Nous sommes accueillis chaleureusement par Lucie, stagiaire et volontaire de longue date. Autour d’un café et de biscuits, bénévoles encadrants et personnes précarisées nous présentent la maison de quartier. Depuis plus de 25 ans, La Rochelle mène une action sociale globale, agissant sur les plans économique, social, culturel et politique pour lutter contre l’exclusion et favoriser l’intégration des personnes précarisées.
Par, pour et avec. Telle est la devise de l’association, qui vise à encourager la participation active de chacun et renforcer les compétences des « bénéficiaires », considérés comme acteurs de leur propre développement. Mais cette participation n’est pas obligatoire !
« Ici, chacun est libre de s’impliquer ou non. Tout le monde est le bienvenu, ne serait-ce que pour s’asseoir, prendre un café ou partager un repas », explique Bernadette, bénévole depuis 1995.
Après la visite des locaux, nous participons à un atelier brise-glace. Chacun choisit une image sur la table pour représenter l’activité de son organisation : une colombe, une foule de manifestants… ou même le personnage Yoda de Star Wars (« Quand on parle de nos activités, on nous prend parfois pour des extra-terrestres ! »). Un exercice ludique qui ouvre la discussion entre Josué et les membres de La Rochelle.
Josué souligne l’importance de l’éducation :
« Les enfants sont les graines du futur. On ne veut pas qu’ils ignorent la situation dans laquelle ils vivent ; on veut qu’ils connaissent leurs droits et qu’ils les fassent respecter. »
Lucie rebondit en partageant son expérience de maman :
« Aujourd’hui, quand j’agis, je me demande toujours : qu’est-ce que je veux nourrir ? Je me suis assagie depuis que j’ai mon fils. »
Dolores, animatrice et responsable du secteur jeunes chez Entraide et Fraternité, interroge : « Quelle est la recette de La Rochelle ? »
Les réponses fusent :
« La solidarité et le lien entre les gens. »
« Il faut aussi des moteurs qui poussent les projets. »
« La liberté. On n’a jamais voulu courir après les subsides. On a toujours voulu rester libres. On fonctionne grâce aux dons et aux bénévoles, et ça marche depuis 30 ans ! »
« On souhaite que La Rochelle dépende des gens. Rien n’est statique. On s’adapte aux besoins. »
Une bénévole se rappelle son premier contact avec la maison de quartier :
« Je suis venue pour la première fois à La Rochelle il y a 20 ans. Mais je suis toujours là. Je ne suis pas partie après avoir obtenu ce dont j’avais besoin au départ, parce qu’ici, j’ai trouvé une deuxième famille. »
Xavier Nys, doyen d’Ath et témoin d’Entraide et Fraternité lors d’un voyage au Pérou, établit un parallèle : « Je vois un point commun entre La Rochelle et les associations péruviennes : l’écoute. La générosité seule ne suffit pas. C’est toute la différence entre générosité et solidarité. »
Un repas solidaire pour clore la matinée
À l’heure du déjeuner, nous rejoignons la salle du foyer de Roux, où un repas préparé par l’équipe de La Rochelle nous attend : pêches au thon, escalope, macédoine, croquettes et glace en dessert. Fidèles à l’esprit de l’association, le repas est à prix libre : les convives donnent ce qu’ils peuvent. Un geste symbolique fort, car l’argent récolté a été reversé à Entraide et Fraternité pour soutenir la Campagne au Pérou.
Kallpa, la force des autres
Orane, coordinatrice et animatrice régionale chez Entraide et Fraternité, plante le décor pour l’après-midi. Elle décrit la situation socio-économique au Pérou traversé par des crises multiples.
Josué poursuit le récit et présente le terrain où il agit auprès de Kallpa, dans le district de San Juan de Lurigancho. On découvre l’origine quechua du nom : Kallpa, « la force des autres ».
« La première étape, quand nous rencontrons les personnes, qu’il s’agisse des parents, des enseignants ou des enfants, c’est d’essayer de comprendre leurs besoins. À partir de là, nous leur donnons les clés pour porter leurs revendications. C’est ce que nous appelons la capacitación », explique Josué Suarez.
La journée se termine par un moment de questions-réponses, révélant la diversité des sujets qui préoccupent les participants : accaparement des terres, violences contre les ONG, plaidoyer, corruption des médias, trafic de drogue, rôle de la religion…
De San Juan de Lurigancho à la périphérie carolo, qu’on l’appelle « par, pour et avec » ou capacitación, la solution est à trouver du côté de l’action collective portée par les premiers concernés.






