Le 27 février prochain, les députés fédéraux débattront, en présence d’expert.es, d’une loi visant à faire participer tous les créanciers aux allègements de dettes des pays du Sud global. Rédigée avec l’expertise d’avocats, d’universitaires et de plusieurs ONG, dont Entraide et Fraternité1Les autres ONG ayant contribué à l’élaboration de cette proposition législative sont le CADTM, le CNCD-11.11.11 et son homologue flamand 11.11.11 ainsi que OXFAM Belgique., cette loi est très largement soutenue par la société civile et les syndicats2Voir la tribune « Nécessité d’une loi pour impliquer les banques dans les allègements de dette », consultable sur le site www.annulerladette.be. Elle contribuera à donner aux États surendettés les moyens de respecter les droits fondamentaux de leurs populations. Elle permettra également d’assurer l’égalité entre tous les créanciers et d’éviter que l’aide au développement de la Belgique serve à payer ceux qui refusent de coopérer aux allègements de dettes.
La dette des pays du Sud global atteint des niveaux record. Au moins 54 pays— abritant plus de la moitié de la population vivant dans l’extrême pauvreté — sont en détresse financière. Leur surendettement résulte principalement des effets de la pandémie du Covid-19, de la guerre en Ukraine, de la hausse des taux d’intérêt décidée par les banques centrales du Nord, mais également des conséquences économiques du dérèglement climatique.
Face à ce cette situation qui ne fait qu’empirer, l’ONU appelle à des mesures urgentes d’allègement de la dette. Cependant, faute d’obligation légale, certains créanciers, dont les grandes banques, refusent de participer à cet effort collectif, contrairement aux États créanciers qui participent à ces allègements comme le fait la Belgique.
En refusant de négocier des réductions de dettes, ces créanciers non coopératifs engrangent des millions en paiements d’intérêts. Autant d’argent qui échappe au financement de la santé, de l’éducation, de l’agriculture paysanne ou encore de la lutte contre la crise climatique. Sans compter que l’aide au développement versée par nos pays sert à rembourser ces créanciers, au détriment des populations sur place. En effet, par crainte d’actions en justice intentées par ces créanciers non coopératifs, les États surendettés utilisent les sommes disponibles – dont les fonds de l’aide au développement – pour payer les créanciers non coopératifs plutôt que pour répondre aux besoins de leurs populations.
Face à l’échec des initiatives volontaires pour faire participer tous les créanciers aux allègements de dettes, des lois doivent donc être adoptées à brève échéance. Après les États-Unis où une proposition de loi est actuellement en discussion dans l’État de New York, la Belgique est le deuxième pays à s’engager dans cette voie législative.
Pour Renaud Vivien, coordinateur du service politique d’Entraide et Fraternité, « la Belgique a les moyens d’agir, comme elle l’a fait en 2015 avec sa loi contre les ‘fonds vautours’, ces entreprises qui spéculent sur la dette des États en détresse financière. Cette loi pionnière au niveau mondial avait créé un effet d’entraînement chez nos voisins puisque la France avait adopté un dispositif juridique anti-‘fonds vautours’. La Commission européenne avait, quant à elle, commandé une étude de faisabilité pour une réglementation européenne inspirée de la loi belge. La nouvelle proposition de loi s’inspire de ce texte en permettant d’éviter au maximum que les créanciers non coopératifs bénéficient des efforts réalisés par les autres créanciers. L’objectif est double. Premièrement, cette loi permettra aux pays débiteurs de protéger les droits fondamentaux de leurs populations. Deuxièmement, elle contribuera à rendre plus efficaces et plus justes les restructurations de dette en traitant de manière équitable tous les créanciers d’un même pays en détresse financière. »
Pour atteindre ces objectifs, la proposition de loi prévoit, d’une part, que tous les créanciers relevant de la juridiction belge communiquent au gouvernement les raisons pour lesquelles ils refusent de participer aux initiatives multilatérales de restructuration des dettes. D’autre part, le texte prévoit que tous les créanciers non coopératifs, publics comme privés, qui saisissent les tribunaux belges ne pourront pas obtenir davantage que ce qu’ils auraient obtenu s’ils avaient participé aux efforts collectifs d’allègement de la dette.
Contacts :
Presse – Jean-François Lauwens : 0477/57.26.07
Plaidoyer politique – Renaud Vivien : 0497/04.79.99
Plus d’infos sur cette proposition de loi sur annulerladette.be
- 1Les autres ONG ayant contribué à l’élaboration de cette proposition législative sont le CADTM, le CNCD-11.11.11 et son homologue flamand 11.11.11 ainsi que OXFAM Belgique.
- 2Voir la tribune « Nécessité d’une loi pour impliquer les banques dans les allègements de dette », consultable sur le site www.annulerladette.be