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Analyses

Désobéissance civile : un dernier recours ?

par Alexandre Blanchart
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« On est prêts à prendre des risques à la hauteur des enjeux. »1Socialter, juin-juillet 2024, p.79 socialter.fr

Jets de peinture sur des vitres de protection de tableaux célèbres, blocages de routes, perturbations d’assemblées générales d’entreprises : les cas de désobéissance civile semblent se multiplier. Ce mode d’action militante suscite la controverse dans les médias et dans le public : « Pourquoi s’en prendre aux œuvres d’art ? », « Bloquer des routes, c’est prendre la population en otage » …


Les interrogations actuelles à propos de la désobéissance civile concernent, d’une façon ou d’une autre, toutes les organisations de la société civile. Entraide et Fraternité ne fait pas exception. En décembre dernier, EF a soutenu (sans y participer) une action menée par le mouvement écologiste Code Rouge. Cette action, menée sur les aéroports d’Anvers et de Liège, dénonçait les vols de jets privés et leur importante contribution au changement climatique. Mentionné dans la presse, notre soutien a suscité quelques remous au sein de notre public proche. Ces inquiétudes nous incitent à nous pencher plus en détails sur le concept de désobéissance civile mais aussi à clarifier notre position sur la question.

De quoi parle-t-on ?

Selon l’Encyclopædia Universalis, « on parle de ‘désobéissance civile’ lorsque des citoyens, mus par des motivations éthiques, transgressent délibérément, de manière publique, concertée et non violente, une loi en vigueur, pour exercer une pression visant à faire abroger ou amender ladite loi par le législateur (désobéissance civile directe) ou à faire changer une décision politique prise par le pouvoir exécutif (désobéissance civile indirecte). »2https://www.universalis.fr/encyclopedie/desobeissance-civile/

La célèbre encyclopédie insiste sur le terme « civile », en tant qu’acte posé par des citoyen·nes, et précise : « Ce n’est pas une rupture de citoyenneté, ni un acte insurrectionnel. Il s’agit d’une manifestation de ‘civisme’ au sens fort : volonté d’œuvrer pour l’intérêt général, même au prix de risques personnels. Le fait que la désobéissance civile soit nécessairement publique et recherche même la médiatisation la plus forte (ce qui la distingue nettement de l’infraction criminelle), s’inscrit dans ce même registre du civisme : l’acte vise à éveiller la conscience des autres citoyens, à susciter un débat. »

La désobéissance civile est d’abord et avant tout une réponse à une question aussi ancienne que complexe. Peut-on désobéir ? Plus exactement, peut-on désobéir à des lois jugées illégitimes ? À cette question, les partisan·es de la désobéissance civile répondent…oui, mais ! Oui, il y a des situations qui exigent de désobéir à des lois, même si les autorités qui les ont promulguées sont légitimes et/ou démocratiques. Mais, et ce petit mot a toute son importance, cette désobéissance doit répondre à différents critères.

En fonction des auteur·es, la liste ou la définition de ces critères varie quelque peu. Dans leur ouvrage commun Pour la désobéissance civique3 Bové J. et Luneau G., Pour la désobéissance civique, Paris, 2004., le politicien-paysan José Bové et le journaliste Gilles Luneau proposent cependant une liste de critères et donc une définition de la désobéissance civile4 Les deux auteurs préfèrent le terme « désobéissance civique » à celui de « désobéissance civile » mais ces deux notions sont synonymes. , qui fait consensus.

Une action de désobéissance civile est une action qui répond aux six critères suivants5 Ravier, C., Rencontre avec José Bové, l’un des précurseurs de la désobéissance civile en France dans FRANCE 3 REGIONS, https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/aveyron/rodez/rencontre-jose-bove-precurseurs-desobeissance-civile-france-1742321.html, 28/11/2019. :  

  1. Un acte responsable : les risques encourus sont connus au préalable et les participant·es ne se soustraient pas aux éventuelles sanctions judiciaires découlant de l’action.
  2. Un acte désintéressé : la désobéissance est justifiée par la défense de l’intérêt général et jamais par la recherche d’un profit personnel.
  3. Un acte de résistance collective : l’action est accomplie par un collectif et non par une seule personne.
  4. Un acte non violent : il ne peut pas y avoir d’attaques contre des personnes physiques et les attaques aux biens ne peuvent avoir qu’une dimension symbolique.
  5. Un acte ultime : la désobéissance civile s’organise toujours en dernier recours, après avoir épuisé toutes les possibilités de dialogue et/ou d’actions légales.
  6. Un acte transparent : les participant·es agissent à visage découvert.

À cause de la violence de plus en plus forte subie par les mouvements sociaux6Voir les précédentes analyses d’Entraide et Fraternité sur le sujet : https://entraide.be/publication/analyse2024-02/ et  https://entraide.be/publication/analyse2023-09/., cette dernière règle est parfois adaptée. Ainsi, lors de certaines actions de désobéissance civile, des participant·es agissent à visage couvert ou semi couvert. Toutefois, afin de respecter cette juste exigence de transparence, les actions de désobéissance civile sont toujours annoncées et revendiquées par des associations, collectifs, etc. qui assument pleinement l’organisation de l’action.

La désobéissance civile est donc un moyen d’action précis et rigoureux au service de l’idéal démocratique. La désobéissance civile n’a donc rien à voir avec du vandalisme, de la délinquance ou, bien évidemment, du terrorisme.

Désobéir : une vieille histoire

Souvent associée, à juste titre, à des ONG comme Greenpeace, la désobéissance civile n’est pourtant pas une invention des écologistes d’aujourd’hui. Elle est au contraire une constante dans l’histoire des luttes sociales, en particulier lors des XIXe et XXe siècles. L’indépendance de l’Inde, la fin de la ségrégation raciale aux États-Unis, le droit de vote des femmes en Angleterre ou les congés payés en France ont ainsi été obtenus grâce à des mouvements pratiquant, de façon régulière ou ponctuelle, la désobéissance civile.

En Inde, Gandhi, le principal leader de la résistance à la colonisation britannique, utilise la désobéissance civile comme principal moyen d’action. Profondément inspiré par ses convictions religieuses hindouistes, le Mahatma considère la non-violence comme le cœur de son engagement spirituel et politique7Deliège, R., Gandhi, sa vie et sa pensée – un modèle pour le XXIe siècle, Villeneuve-d’Ascq, 2017, pp.149-170, https://books.openedition.org/septentrion/13933.. En conséquence, le mouvement indépendantiste organise à maintes reprises des actions de désobéissance civile massive. La plus connue, la marche du sel, concentre toute l’attention politique, médiatique et populaire en mars-avril 1930. Durant un mois, la marche traverse le pays jusqu’à la plage de Dandi8Village côtier du Gujarat, sur la côte ouest de l’Inde., où les participant·es enfreignent la loi coloniale en collectant le sel à même la mer9Deliège, R., Op Cit, pp.62-68. . Outre la dénonciation d’une injustice économique, le but de la marche est bien entendu de défier l’autorité britannique en désobéissant ouvertement à sa loi. La répétition de telles actions de masse finira par rendre l’indépendance du pays inévitable.

Également inspiré par une grande ferveur religieuse, le pasteur afro-américain Martin Luther King met la non-violence et la désobéissance civile au centre des luttes anti-racistes des années 1950-1960. Face à la violence de la ségrégation raciale en vigueur dans les sud des États-Unis, le pasteur King théorise en effet le recours systématique à des pratiques telles que le boycott, l’organisation de manifestations non autorisées par les autorités ou encore le sit-in10Luther King Jr., M., Letter from Birmingham jail, pp.1-12, https://www.learningforjustice.org/sites/default/files/general/Letter%20from%20Birmingham%20Jail%20MLK.pdf.. Dans le même temps, il rejette catégoriquement le recours à toute forme de violence physique, pour des raisons à la fois éthiques et pratiques. Bien que cette stratégie suscite encore des débats dans les milieux militants, il est indéniable qu’elle réussit à influencer les présidents Kennedy11John Fitzgerald Kennedy dit « JFK » (1917-1963) est un homme politique américain membre du Parti démocrate. Il est président des Etats-Unis entre le 20 janvier 1961 et son assassinat le 22 novembre 1963. puis Johnson12Lyndon Baines Johnson (1908-1973) est un homme politique américain membre du Parti démocrate. Vice-président de Kennedy, il devient président suite à l’assassinat de ce dernier et occupe cette fonction jusqu’au 20 janvier 1969. . La ségrégation raciale est ainsi abolie progressivement entre 1964 et 1968.

Le sit-in Le sit-in est un type de manifestation au cours duquel les participant·es s’assoient sur la voie publique (ou dans un espace privé) au lieu d’y défiler. Ils et elles restent dans cette position le plus longtemps possible, souvent jusqu’à l’évacuation par les forces de l’ordre. Activité récurrente du mouvement des droits civils afro-américain, le sit-in est également fort prisé des mouvements écologistes actuels.

Moins connues de nos jours mais tout aussi importantes dans l’Histoire, les suffragettes anglaises ont, elles aussi, pratiqué la désobéissance civile. En 1903, un groupe de féministes anglaises menées par Emmeline Pankhurst13Emmeline Pankhurst (1858 – 1928) est une féministe britannique considérée par Time Magazine comme une des cent personnalités les plus influentes du XXe siècle. Elle est surtout connue pour son action en faveur du suffrage universel féminin. fonde la Women’s Social and Political Union (WSPU) afin de militer en faveur du droit de vote des femmes. Ses militantes subissent une violente répression policière le 18 novembre 1910, lors d’une manifestation à Londres14Alors que 300 femmes manifestent devant le Parlement britannique, elles sont attaquées par des policiers et des passants masculins. Les violences font une centaine de blessées et deux mortes parmi les manifestantes. On dénombre également une vingtaine d’agressions sexuelles.. En réaction, le WSPU opte pour la désobéissance civile. Grèves de la faim, destruction de vitrines ou encore apprentissage du jiu-jitsu sont ainsi au programme de l’organisation jusqu’à son auto-dissolution en 191715Ruz, C. et Parkinson, J., ‘Suffrajitsu’: How the suffragettes fought back using martial arts dans BBC NEWS, https://www.bbc.com/news/magazine-34425615, 05/10/2015.. Ces méthodes ne font pas l’unanimité mais elles contribuent, au même titre que les plus classiques, à l’obtention du droit de vote pour les femmes en 1918 (pour les femmes de plus de trente ans) et en 1928 (pour toutes les femmes majeures). 

Enfin, qui se souvient, de nos jours, que les premiers congés payés ont été obtenus à la suite de grands mouvements de désobéissance civile ? C’est pourtant ce qui s’est passé en France lors de la période du Front populaire, entre 1936 et 1938. En mai 1936, les élections législatives françaises voient la victoire des socialistes de la SFIO et des communistes du PCF16Section Française de l’Internationale Ouvrière et Parti Communiste Français, les deux principaux partis de la gauche française à l’époque.  . Dans la foulée, une vague sans précédent de grèves éclate dans tout le pays. L’objectif ? Inciter le nouveau gouvernement à appliquer le programme pour lequel il a été élu. Ces grèves s’accompagnent bien souvent d’occupations d’usines. Ouvriers et ouvrières occupent durant plusieurs jours usines, ateliers ou locaux d’entreprises17Vigreux, J., Le Front populaire 1934-1938, Paris, 2022, pp.51-53.. Ces occupations, très bien organisées par les syndicats, se déroulent sans violence et dans la bonne humeur… et ce malgré l’hostilité farouche de la droite et du patronat18Idem. ! Au même titre que l’intense agitation sociale et culturelle de l’époque, ces occupations contribuèrent à la réalisation des mesures-phares du Front populaire : les congés payés bien sûr, mais aussi la réduction du temps de travail, la création de la SNCF, etc. 

LES ZAD Un terme revient souvent dans les débats politiques et/ou médiatiques relatifs à la désobéissance civile : celui de “ZAD ». Que signifie-t-il ? Il s’agit en fait du détournement de l’acronyme administratif français “zones d’aménagement différé” en “zones à défendre19« L’idéologie des zadistes”, France Inter, 30-10-2014, https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-edito-politique/l-ideologie-des-zadistes-1893614.  Il désigne l’installation de militant·es, souvent jeunes, issu·es majoritairement de la classe moyenne, universitaires et inspiré·es par une idéologie écologiste ou anticapitaliste radicale, dans un espace vert voué à la destruction par les pouvoirs publics. Les militant·es occupent de façon illégale le terrain à sauver et y organisent une mini-société autogérée, à base d‘abris de fortune, de jardinage, d‘arts, etc20Idem.. Il s’agit d’une forme plus radicale de désobéissance civile, ce qui explique que seuls des militant·es indépendant·es des structures politiques ou associatives l’emploient. La ZAD la plus connue est probablement celle de Notre-Dame-des-Landes, dans la région de Nantes, mais le phénomène existe dans d‘autres pays. En Belgique, on peut citer le cas de la ZAD d‘Arlon, sur le site de la Sablière de Schoppach.

Chez Entraide et Fraternité aussi !

Aussi surprenant que cela puisse paraître, la désobéissance civile n’est pas non plus une pratique étrangère à Entraide et Fraternité et à ses partenaires. En effet, à quelques occasions, la pratique de la désobéissance civile a croisé la route de nos associations.

En 2009, lors de la campagne « Créons un climat favorable à l’agriculture paysanne », des membres de l’équipe et des volontaires ont affublé de parapluies verts une série de statues à Bruxelles et à Charleroi, en écho à l’affiche de campagne. Il s’agissait d’attirer l’attention sur l’urgence de mettre en place un modèle agricole écologique pour ralentir le changement climatique. En parallèle, des actions de sensibilisation étaient menés dans différentes gares.

Autre exemple, plus récent : le vol des chaises d’uneagence bancaire liégeoise, le 11 décembre 2015. Ce jour-là, la brigade des Pingouindignés, un collectif de jeunes militants proche d’Entraide et Fraternité (les Alteractifs), appuyé par quelques permanents de l’association, a pénétré dans une agence bancaire de la Cité ardente. La brigade y a dérobé les chaises et justifié son acte à grands coups de banderoles. Objectif : dénoncer l’hypocrisie des principales banques belges qui investissent massivement dans les énergies fossiles… tout en essayant de se donner bonne conscience en finançant la COP21 ! Le vol des chaises répond aux crimes climatiques commis par ces entreprises21Vidéo complète de l’action ici : https://www.youtube.com/watch?v=7OuU9KogXVg.. Bien sûr, il s’agissait d’une réponse symbolique, mais elle a contribué à la montée en puissance de l’enjeu climatique dans le débat public.

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Les actions de désobéissance civile sont cependant loin d’être une pratique systématique chez Entraide et Fraternité. Ses modes d’action habituels sont la sensibilisation du public, le plaidoyer politique et la mobilisation lors de manifestations autorisées. Ces dernières années, vu l’urgence climatique et environnementale, notamment, et le peu de changements politiques obtenus grâce aux modes d’action traditionnels (grèves, manifestations), l’ONG a pourtant jugé utile de réfléchir à ces nouvelles manières de faire pression sur les décideurs et décideuses politiques et d’attirer l’attention du public. Son éventuel soutien ou participation à des actions désobéissantes est conditionné au respect de plusieurs critères, qui s’ajoutent à ceux communément admis pour la désobéissance civile :

  1. L’action doit être en lien direct avec les thématiques de travail d’Entraide et Fraternité.
  2. Le soutien ou la participation se décide au cas par cas et est toujours évalué par l’équipe de direction.
  3. Un soutien d’Entraide et Fraternité n’induit aucune obligation de participation de la part des membres du personnel. 
  4. Entraide et Fraternité garde la possibilité de se désolidariser d’une action au cours de laquelle des infractions au principe de non-violence seraient commises.   

Et dans le Sud ? Les différentes associations soutenues par Entraide et Fraternité dans les pays du Sud ont parfois été plus directement concernées par la désobéissance civile. Cela s’explique bien sûr par leur position en première ligne des conflits sociaux de leurs pays respectifs. Un exemple marquant est l’occupation de l’usine hydroélectrique du barrage de Cana Brava, au Brésil, par le MAB22Le MAB, Movimento dos Atingidos por Barragens, est une association brésilienne qui regroupe et défend les communautés victimes de la construction de barrages. Elle collabore de longue date avec le partenaire historique d’Entraide et Fraternité au Brésil, la CPT-Goiás. . Le 12 août 2013, 40 familles chassées de chez elles23Les multiples violations des droits humains commises lors de la construction de ce barrage ont été mises en lumière par Entraide et Fraternité lors de la campagne de Carême 2023. Voir par exemple : https://www.youtube.com/watch?v=Mfmc0Pe4osg par la construction du barrage commencent à camper aux portes de l’usine. Elles sont rapidement rejointes par d’autres victimes. Au total, plus de 400 familles se lancent dans l’occupation de l’usine24Em GO, 187 familias atingidas pela usine de Cana Brava serão  indenizadas, dans MOVIMENTO DOS ATINGIDOS POR BARRAGENS, https://mab.org.br/2014/12/04/em-go-187-fam-lias-atingidas-pela-usina-cana-brava-ser-indenizadas/.. Le coup de pression sur Tractebel (aujourd’hui Engie), l’entreprise propriétaire du barrage, est indéniable. Au bout de seize mois d’occupation, 187 familles obtiennent une indemnisation25Idem.. La victoire n’est certes pas complète mais elle aurait été impossible sans le recours à la désobéissance civile de masse. 

Bien sûr, la pratique de la désobéissance civile n’aboutit pas toujours à une victoire. Par exemple, depuis plus de 10 ans, en Côte d’Ivoire, un conflit oppose des communautés vivant de l’agriculture à l’entreprise belge SIAT, qui produit de l’huile de palme et du caoutchouc. L’entreprise est accusée d’accaparements de terres et de violation des droits humains. Après des manifestations violemment réprimées, « en 2013, la population locale s’est rassemblée pour protester contre la destruction de ses cultures. ‘Ils ont déplacé des machines (de l’entreprise, note des auteurs) et les ont fait garder par des jeunes, en attendant que le représentant de l’entreprise vienne les récupérer’.26Traduction libre d’un extrait de la lettre adressée le 21 septembre 2015 par le porte-parole du Roi d’Andoh au Représentant spécial des Nations unies en Côte d’Ivoire. Le préfet et les gendarmes locaux ont répondu à cette manifestation par des actes de violence et des représailles à l’encontre des manifestant-es et des journalistes locaux venus couvrir l’événement. 27« Prikro / Site de l’ex-complexe de Sodesucre de Sérébou-Comoé. Des affrontements font plus de 13 blessés graves », Le Temps de l’Economie, juin 2013. « Des populations disent non à l’implantation d’une usine d’hévéa. Elles préfèrent plutôt une unité de transformation des produits vivriers », Fraternité Matin, juillet 2013 » 28Extrait de « Les acquisitions de terres à grande échelle en Afrique : Impacts, conflits et violations de droits humains – Le cas de la filiale ivoirienne de la SIAT », dossier politique, collectif d’ONG. https://www.cidse.org/wp-content/uploads/2022/06/FR-Land-Briefing-SIAT.pdf  . Cependant, même dans ces cas d’échec, la désobéissance civile permet de visibiliser des conflits bien trop souvent ignorés.  

Il faut enfin souligner le courage de ces communautés qui luttent pour leurs droits dans des contextes politiques plus défavorables et souvent plus autoritaires que chez nous – même si la répression se durcit dans nos pays également29Voir les précédentes analyses d’Entraide et Fraternité sur le sujet : https://entraide.be/publication/analyse2024-02/ et  https://entraide.be/publication/analyse2023-09/. Leurs actions de désobéissance civile font face à des réactions souvent violentes et disproportionnées de la part des autorités. Mais la défense des droits fondamentaux étant une question de survie, cet impératif prend le pas sur la peur des violences et de la répression.

Conclusion  

Au terme de cette analyse, une conclusion s’impose : la désobéissance civile n’est ni plus ni moins qu’une technique de lutte pacifique et démocratique. À ce titre, elle accompagne les mouvements sociaux depuis, au moins, le début du vingtième siècle. Bien utilisée, son efficacité est indéniable, comme le prouvent les nombreux exemples cités dans ces pages. Cependant, elle ne constitue pas une solution miracle. Les techniques de mobilisation plus classiques (manifestation, plaidoyer politique, etc.) ont également leur importance. Il est également possible que la désobéissance civile soit mal utilisée et qu’elle contribue à séparer militant·es et grand public. Il importe donc de bien l’expliquer et de la différencier des pratiques délictueuses comme le vandalisme ou criminelles comme le terrorisme, afin que chacun·e puisse choisir en connaissance de cause sa façon de lutter « pour que la terre tourne plus juste ».  

# désobéissance # Engie # SIAT # Violences / Guerre