Il y a dix ans s’effondrait le Rana Plaza, au Bangladesh. Une date éminemment symbolique puisque ses 1100 travailleurs et surtout travailleuses mortes sous les décombres sont devenues les symboles des dérives de la mondialisation et de l’impunité des entreprises non respectueuses des droits humains et de l’environnement.
Catastrophes sanitaires, environnementales, humaines : on ne compte plus les violations de droits humains et du travail, les accaparements de terre, les pollutions, les explosions d’usines toxiques, les marées noires, les maladies mortelles dues à l’amiante et autres, les catastrophes minières, les exportations de pesticides toxiques, les lignes de crédit accordées à des colonies de peuplement illégales, etc., provoqués par des entreprises multinationales… Et ce ne sont que les effets visibles de leur absence de responsabilité.
Longtemps, une logique autorégulatrice et volontariste a prévalu mais les violations des droits humains et de l’environnement n’ont jamais été aussi nombreuses dans les chaînes de valeur : le consommateur peut toujours sans sourciller acheter des smartphones composés de minerais issus de zones de conflits, des vêtements confectionnés dans des conditions d’esclavage, du cacao récolté par des enfants ou de la viande produite grâce à une déforestation massive.
Pour la société civile, la parade consiste à imposer aux entreprises basées dans nos pays un devoir de vigilance visant à les contraindre à prendre les mesures nécessaires au respect des droits humains et de l’environnement tout au long de leurs chaînes de valeur, opaques et complexes. Pour que la chose soit contraignante, il faut un mécanisme de plainte et de sanction.
Une première législation française sur le devoir de vigilance est née en France en 2017. C’est elle qui a permis que, comme EDF, Casino ou TotalÉnergies, BNP Paribas soit récemment assignée à deux reprises pour violation de cette loi devant les tribunaux français. D’une part, première mondiale, la banque est assignée par six ONG en raison de son soutien actif et massif à des groupes parmi les plus agressifs dans l’expansion pétrolière et gazière. D’autre part, en appui de la CPT (Commission pastorale brésilienne de la terre, partenaire historique d’Entraide et Fraternité), l’ONG Notre affaire à tous a assigné la banque pour sa complicité dans la déforestation. BNP Paribas soutient financièrement l’entreprise Marfrig, numéro deux brésilien de la viande bovine, responsable de plus de 120.000 hectares de déforestation illégale de la forêt amazonienne et de la savane du Cerrado. Pour rappel, l’État belge est encore à ce moment le premier actionnaire de BNP Paribas.
Chacun le reconnaît désormais : la nécessité d’une législation sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de droits humains et d’environnement s’impose. Une directive est discutée ces jours-ci au Parlement européen. En Belgique, la Chambre a aussi repris ses travaux sur le sujet.
Le devoir de vigilance des entreprises n’est pas une fin en soi mais un moyen pour le respect des droits humains et de l’environnement.
Lire notre carte blanche dans La Libre sur le sujet.
Les entreprises doivent-elles respecter les droits humains et l’environnement ?
des Belges sont d’accord
avec l’idée que les
entreprises devraient
être légalement obligées
de s’assurer qu’elles ne
sont pas impliquées
dans des violations des
droits humains, telles
que le travail forcé ou
l’accaparement de
terres.
des Belges sont d’accord
avec l’idée que les
entreprises devraient
être légalement obligées
de s’assurer qu’elles
ne contribuent pas à des
dommages environnementaux
tels que la
pollution de l’air ou la
destruction de la biodiversité
en dehors de l’UE.
des Belges sont
d’accord avec l’idée
que les entreprises qui
causent des violations
des droits humains et
des dommages
environnementaux
dans le monde ou y
contribuent devraient
être légalement
responsables.
des Belges estiment
que les victimes
devraient être
autorisées à
poursuivre les
entreprises
responsables en
justice dans le pays où
elles sont basées.
Source : YouGov – septembre 2021 – sondage dans 9 pays de l’UE
Non au commerce avec les colonies israéliennes
Le 27 février, le ministre de l’Économie, Pierre-Yves Dermagne (PS), a reçu des mains de nombreuses ONG, dont Entraide et Fraternité, les 20.300 signatures de Belges demandant d’interdire tout commerce avec les colonies israéliennes. Le gouvernement israélien d’extrême droite intensifie actuellement l’installation de colons en Cisjordanie occupée. Il s’agit d’une infraction au droit international.
Des sociétés belges comme Solvay et nombre de banques (BNP Paribas, KBC, Argenta, Delen, Degroof Petercam, Axa, ING et Belfius via Candriam) ou d’autres marques (Carrefour) ayant un lien fort avec la Belgique continuent de soutenir d’une façon ou l’autre la colonisation israélienne. Carrefour a lancé une chaîne de franchisés dans les colonies illégales et BNP Paribas est le plus grand créancier européen d’entreprises opérant et impliquées dans les colonies israéliennes illégales, avec un montant total de 15,4 milliards € de crédits et 3 milliards € d’investissements.